2010 et 2011 sont deux grandes années pour quelques jeunes auteurs qui fréquentent CoCyclics. Leur premier roman est paru. C'est plutôt bien au final de passer plus tard, un peu comme aux oraux du bac. Je bénéficie ainsi de l'expérience des autres. (
Je rappelle que vous pouvez précommander mon roman ici.). J'observe ce qui se passe, avec la même circonspection que mon chat quand je lui propose autre chose que sa croquette habituelle dans sa gamelle.
L'après-publication... (Je parle en mon nom propre.) On n'y pense pas tant que ça quand on est dans l'attente. On reste focalisé sur la publication en elle-même. Allez, j'irai jusqu'à dire que cela relève un peu de l'obsessionnel... Rien d'anormal pour un premier roman. Pour continuer la digression, j'espère que l'attente va amplifier la joie du moment à proprement parler où je serrerai le bouquin sur mon coeur. Ensuite, je courrai en le brandissant dans le jardin, pour que les vaches alentours l'admirent. Enfin, si elles sont dehors, parce que là, à cause de la neige on les a rentrées.
Donc, sans les copains, je serais focalisée sur l'anticipation de ce nouvel émolument dans la vie d'
Au Sortir de l'Ombre. Si je me base sur l'étude de ma propre personne, tout égocentrique que cela puisse paraître, je remarque que c'est récurrent chez l'aspirant auteur : on anticipe la fin de chaque étape, mais pas forcément la suivante. Par exemple, quand on écrit le premier jet, l'angoisse c'est de savoir si on va le terminer. Ensuite, si la correction se terminera un jour, puis si le résultat va survivre à la bêta-lecture, puis si on va finir par l'envoyer à des éditeurs, puis si on va finalement obtenir une réponse positive, puis comment va être la couv'... et au fait, comment vont se passer les corrections ?
Mais une fois que la sortie est proche, l'angoisse c'est plutôt, comment le roman va-t-il être accueilli ? Le pire étant que personne ne le remarque. Bref. On y arrive, à la critique.
La critique n'a rien à voir avec la bêta-lecture. Normalement, si vous avez bien fait votre boulot avec votre éditeur, l'avis du lecteur doit rentrer dans le domaine du subjectif : tout y passe, les thèmes, les personnages, le style, l'histoire, tout. Impossible que quelqu'un aime 100 % de vos choix. Même quand vous adorez un bouquin, il vous suffit de réfléchir un peu pour trouver des éléments auxquels vous n'adhérez pas. D'ailleurs, pour mes lectures, j'ai pris la ferme décision de ne pas me placer dans une optique décorticage, histoire de ne pas me gâcher ce qui m'a plu.
Le problème, c'est que les critiques même argumentées sont écrites pour les autres lecteurs, pas pour l'auteur. C'est normal, l'auteur n'est pas le texte, il faut pouvoir en parler sans langue de bois. Sauf que la relation entre l'auteur et le texte sont très étroites. On ne bosse pas des mois ou des années sur un tel projet sans se sentir meurtri quand un lecteur déteste ce qu'on a produit, quelqu'en soit la raison et bien qu'il en ait le droit.
(NDLR: c'est pour ça que je ne lirai que les bonnes critiques d'ASLO publiées à droite à gauche–je suis optimiste. Je veux bien recevoir en direct tous les retours polis, francs, hautement désapprobateurs que vous voudrez, ce n'est pas la même chose, parce qu'a priori, ce sera formulé différemment.Vous conviendrez que si vous discutez devant moi de mon bouquin, vous prendrez plus de pincettes qu'en mon absence. Genre, au lieu de me dire, c'est tout pourri, franchement, moi les monstres je trouve ça super naze, je ne sais même pas comment on peut lire des histoires aussi abracadabrantes sans parler de les écrire !", vous opterez sûrement par un délicat: "vraiment, je suis désolé, les monstres, ce n'est pas mon truc." C'est moins blessant.)
Revenons à nos moutons. Ce qui m'inquiète le plus, c'est le questionnement que génère parfois ces avis. Genre, à quoi bon écrire ou se faire publier si certains trouvent mes textes aussi nuls ? Ou, combien aiment vraiment, combien sont déçus ? Doit-on risquer de décevoir tant de gens ?
À mon sens, ce n'est pas une bonne question. Est-ce qu'on va arrêter de vendre du chocolat parce que certains sont réfractaires ? Non. Ou bien, si on examine la proportion du lectorat français qui déteste la fantasy ou la SF, doit-on en déduire qu'il faut retirer ces genres du marché ? NON.
D'autre part, à quel point doit-on se remettre en question suite à la critique ? S'il n'y a aucune critique positive, évidemment. Mais j'aurai tendance à prôner la prudence, à ne pas chercher à plaire à tout le monde. Il est aussi question d'identité, mine de rien.
Nathan Bransdford dit :
Be yourself.
"Queries, manuscripts, correspondence: the absolute best thing you can do is to just be yourself."
Je suis d'accord. Ce qui fait un bon texte, c'est un auteur qui lui donne une tonalité propre. Il faut aimer ses textes au-delà des critiques. Dans mon cas, quand je pense à
Au Sortir de l'Ombre, je sais que je ne cesserai pas de l'aimer sous prétexte qu'un critique l'a détesté.
Est-ce que forte de ces réflexions, j'encaisserai mieux les avis négatifs ? Hum, je serai présomptueuse de croire que cela ne m'affectera pas. Me connaissant, j'espère juste que ça me donnera envie de me noyer sous le travail. Ce sera bon pour CoCyclics et pour Siwès. En tout cas, ça ne m'arrêtera pas.
Le côté obscur de la force, sans doute.